Reportage /Crise entre la CEDEAO et la junte à Bamako

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Comment les Maliens résidants en Côte d’Ivoire vivent la situation

En Côte d’Ivoire, le bras de fer entre le Mali et la Communauté économique des Etats de l’Etat de l’Ouest (CEDEAO) est suivi de très près. Le pays compte en effet, plus de trois millions de ressortissants Maliens.

Il est 11 heures. Ce mardi 11 janvier 2022, Karidjatou a la mine renfrognée ! Foulard gris soigneusement noué à la tête, cette quinquagénaire ressort du secrétariat du Haut conseil des Maliens de Côte d’Ivoire. Nous sommes au rez-de-chaussée l’imposant immeuble « Le Mali » d’Abidjan-Plateau. C’est dans cet imposant immeuble que loge l’ambassade du Mali en Côte d’Ivoire. Le bâtiment abrite également la plupart des grosses entreprises de ce pays voisin.  « On vient de dire que mon pays, le Mali est sous sanction. Que les frontières sont fermées. Que je dois reporter mon voyage sur Bamako », confie, la voix grave, la commerçante. Karidjatou est en Côte d’Ivoire depuis 20 ans. Elle projetait un voyage pour Bamako et était venu voir dans quelle mesure le « Haut Conseil pouvait lui faciliter » déplacement.  Le secrétaire permanent lui a fait savoir que le Mali était sous sanctions et qu’il fallait attendre que « ces moments de crises » passent… Comme Karidjatou, ils sont plus de trois millions de Maliens vivant en Côte d’Ivoire, selon le Haut Conseil des Maliens de Côte d’Ivoire, qui subissent déjà les conséquences des sanctions de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) contre le Mali.

Sanctions « trop dures »

Lors du sommet extraordinaire des dirigeants de la CEDEAO, qui s’est tenu 9 janvier, des sanctions ont été adoptées contre le Mali, en raison du non-respect par la junte au pouvoir de l’échéance de février pour organiser des élections et ramener les civils au pouvoir. L’organisation sous régionale a décidé de la fermeture des frontières entre le Mali et les pays membres de la CEDEAO ; le gel des actifs maliens au sein de la Banque Centrale des États d’Afrique de l’Ouest ; la suspension des transactions sauf pour les produits de première nécessité et pharmaceutiques ; la la coupure des aides financières ; le rappel des ambassadeurs des pays membres au Mali. Et le communiqué de l’organisation était sans ambiguïté en ce qui concerne leur application : « Ces sanctions seront appliquées immédiatement ». Le lendemain, lundi 10 janvier, la junte dirigée Assimi Goïta, a réagi, promettant de tenir tête à l’institution sous régionale.

Les diplomates « préoccupés »

A l’immeuble ‘’Le Mali’’, les bureaux du Haut conseil et même de l’ambassade sont ouverts. Le président du Haut Conseil, Mahamadou Diawara reçoit ses compatriotes, tente d’expliquer et de rassurer les uns et les autres. L’ambassadeur aussi. « Vous le savez, nous sommes dans une période très sensible. Nous sommes astreints au droit de réserve », confie un diplomate, qui a requit l’anonymat. Il fait remarquer que les « autorités maliennes » ont effectivement « rappelé » les ambassadeurs du Mali dans les pays de la CEDEAO. « Vous comprenez que l’ambassadeur ne vous parlera pas et il ne souhaite pas être évoqué dans votre reportage », soutient notre interlocuteur. Les mesures de la CEDEAO et certainement la décision de la junte militaire de croiser le fer avec l’organisation sous régionale font craindre aux 3 millions de Maliens en Côte d’Ivoire, des jours sombres. Mais le secrétaire général adjoint du Hat Conseil des Maliens résidants en Côte d’Ivoire espère bien que les deux parties reprendront les discussions le plus tôt possible. Surtout que la CEDEAO a promis dans son communiqué que les sanctions « seront progressivement levées uniquement après l’obtention d’un chronogramme satisfaisant soit finalisé ». C’est, en tout cas, le vœu le plus ardent de Karidjatou, qui espère l’ouverture des frontières entre son pays et la Côte d’Ivoire dans les meilleurs délais…

Tani Bè Ousmane

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