L’Afrique a-t-elle vraiment voulu atteindre son autosuffisance alimentaire ? Depuis le début des indépendances, la plupart de nos États ont élaboré et déployé diverses politiques agricoles pour produire plus, pour mieux se nourrir. Mais hélas, plus de 60 ans après, le continent noir continue de dépendre de l’extérieur pour combler ses besoins de consommation en céréales.
Avec 65 % des terres arables, véritable atout pour nourrir 9 milliards de personnes dans le monde d’ici à 2050, l’Afrique continue d’abriter 249 millions de personnes souffrant de la faim, sur un total mondial estimé à 828 millions de personnes ! Le scandale, c’est que, ce sont seulement 10% de ces vastes superficies de savane arables (400 millions d’hectares) qui sont cultivées ! 90% dorment et on y meurt de faim ! Malgré les multiples programmes déployés ici et là et ayant justifié des dépenses de sommes qui se chiffrent en milliards de dollars.
Il y eu certainement des obstacles avérés. Certes, mais plus de 60 ans d’échecs continus. Cela peut paraître curieux, d’autant plus que d’autres pays, notamment les pays asiatiques qui étaient au même niveau de développement que nos pays, ont pu tirer leur épingle du jeu. Au point de se hisser aujourd’hui aux rangs des grands exportateurs de riz. Citons l’Inde, la Chine…
À l’heure où la situation alimentaire devient inquiétante et dramatique dans certains pays, notamment en Afrique et où les besoins alimentaires mondiaux ne cessent d’augmenter, chaque pays devrait revisiter ses programmes et déployer, au-delà des vains slogans, une politique active pour faire produire nos terres.
En tout cas, nos fournisseurs traditionnels ont prévenu. Ils réduiront leurs exportations. Depuis juillet 2023, l’Inde, le plus gros pourvoyeur de riz importé (en 2023, il a exporté 22 millions de tonnes de riz vers 140 pays), a même interdit, un temps, ses exportations de riz blanc non basmati…
Le défi de l’autosuffisance alimentaire va donc au-delà de la simple sécurité alimentaire qui consiste à prévoir des situations d’urgence et à s’en prémunir par des mesures appropriées. Mais l’urgence aujourd’hui, consiste à sortir de la dépendance de l’extérieur. Il s’agit très concrètement de produire ce dont on a besoin pour l’alimentation de base de sa population.
Cette quête doit déboucher sur la diversification des cultures pour préserver l’environnement tout en augmentant la productivité agricole. Le gouvernement ivoirien l’a bien compris. Le Programme d’urgence en cours de mise en œuvre, doit traverser le temps. Il ne doit jamais être abandonné. Il faut continuer de mobiliser le monde paysan, lui apporter tout le soutien étatique pour qu’enfin, l’Afrique nourrisse le monde. Le temps est venu de tirer le rideau sur l’hypocrisie des promesses de l’autosuffisance alimentaire.
Ténin Bè Ousmane